Les virevoltants

Du 27 avril au 10 mai : de Cuzco au Lac Titicaca (1066 km – 23 494 km parcourus)

Jeudi 27 avril. Ce matin, on se repose des derniers jours de route, puis après l’école, on descend en ville. Cuzco est une très belle ville, la plus ancienne du Pérou habitée sans discontinuer. « Qusc » signifie « nombril » en quechua, c’était la capitale de l’empire Inca, et donc le nombril de leur monde. Il reste des gros murs taillés en blocs taillés et ajustés au millimètre, sans ciment. Autour de la Plaza de Armas, la cathédrale et l’église de la Compañía (les jésuites) occupent des lieux incas détruits et rivalisent par leur taille et leur façade sculptée. On ne peut pas les visiter sans payer un ticket spécial (et cher, n’oublions pas qu’on est dans une ville très touristique, les péruviens l’ont bien compris).

Cuzco

à pied, c’est plus simple!

Iglesia de la Compañía

Cathédrale (ou l’inverse…)

On va manger dans le joli quartier San Blas dans un resto végétarien très chouette. Nos 3 familles s’y retrouvent et c’est très animé (un peu trop pour Marius qui a mal à la tête, l’altitude lui a causé une sinusite). En sortant, un jeune hippie (beaucoup sont venus habiter dans la Vallée Sacrée) avec des dessins sur le front nous souhaite de continuer notre voyage en cherchant la lumière. Pour l’heure, on se promène dans les rues. Aloïs et Rafael trouvent la célèbre pierre à 12 angles dans une ruelle aux murs incas.

12 angles!

brochette de copains… et une petite invitée!

joli feu et surtout système très pratique du compte à rebours

Tous les quelques mètres, des filles proposent des massages et des excursions. Le côté harcèlement du touristique est un peu fatigant. On va acheter nos tickets pour le Machu Picchu, puis on fait des courses et on rentre en taxi dans notre camping haut-perché. Caro et Pierre sont sur le départ, et on s’improvise une soirée à la recette toujours gagnante : Les enfants dans un CC avec un dessin animé, et nous avec Marc et Juliette dans l’autre. La nuit est bien fraîche et humide !

Vendredi 28 avril. Malgré la pluie nocturne, la matinée est plutôt ensoleillée. Du coup, on n’emporte pas les vestes de pluie pour descendre en ville. Lumineuse idée : alors qu’on mange dans un joli resto, il se met à pleuvoir, et lorsqu’on sort, il grêle ! Impossible de faire la balade-visite prévue. Il pleut bientôt des cordes, l’eau tombe des toits en inondant les rues. Des policiers détrempés s’époumonent dans des sifflets pour faire la circulation, sans aucun effet. On abrège donc, on passe à la boulangerie et on saute dans un taxi alors qu’on est bien trempés et frigorifiés. On passe la soirée tous ensemble dans le CC de Marc et Juliette.

Samedi 29 avril. Après un bon coup de chauffage matinal dans l’espoir de sécher l’intérieur du CC tout humide, on plie bagage entre les averses de pluie et de grêle, et on profite d’une éclaircie pour s’élancer dans la ville. Cette fois, on a repéré le trajet et on sort sans encombres, ouf ! 30 km plus loin, on s’arrête au village de Chinchero, à 3720m, sur le versant sud de la Vallée Sacrée. C’est tout calme. Dans l’après-midi, je pars me promener avec les garçons jusqu’au Balcón del Inka, qui offre une belle vue sur les ruines des terrasses inca. Puis on entre dans un atelier où travaille une coopérative de tisserandes. Leur travail est magnifique, très ouvragé. Une femme qui teint de la laine nous montre les différentes plantes et la cochenille utilisées pour teindre les fils. On finit par le « centre culturel », une cour avec quelques lamas, alpagas et objets traditionnels, dont le jeu « sapo » (crapaud).

Ruines et terrasses de Chinchero

un mur content

aliments et produits de base de la région (et dire que la crème de marrons de Papou est terminée…)

Dimanche 30 avril. Un type de la municipalidad nous réveille à 6h pour qu’on déplace le CC car ils installent des stands à notre emplacement. Après le petit-déjeuner, on se dirige vers le marché artisanal dominical, réputé pour être le plus joli de la vallée. Il y a en effet du bel artisanat, surtout des tissages. Egalement quelques rangées de fruits, légumes, fromages et pain. Ça négocie ferme en quechua, et certaines personnes font même du troc.

rouge et bleu / azul y rojo

On démarre ensuite pour aller vers l’ouest de la vallée. On fait l’impasse sur le site de Moray, sûrement très intéressant, car on n’a pas le ticket adéquat pour la visite, et on va jusqu’au Salines de Maras. Ce système d’exploitation de sel existe depuis l’époque pré-inca : un ruisseau chaud et très salé (on a goûté) coule de la montagne et est dévié dans d’innombrables bassins taillés à flanc de montagne. L’eau salée s’évapore lentement et le sel cristallise avant d’être récolté, en grande partie pour le bétail et… pour les touristes ! ça donne un très joli patchwork, on passe un bon moment à nous promener sur les passages étroits entre les bassins.

Sur la route des salines

bassins taillés et accolés à la montagne

récolte

ça souffle en haut!

On reprend ensuite la route principale au niveau de Urubamba et on continue jusqu’à la cité de Ollantaytambo. L’arrivée est délicate : les rues sont en gros pavés anciens, très étroites et surchargées. On trouve un endroit qui fait office de parking gardé le long de la rue bondée de bus qui mène à la gare (d’où partent les trains pour Aguascalientes au pied du Machu Picchu). Hervé et les garçons sont sur la place pendant que je me repose, puis je les rejoins. L’animation bat son plein : les villageois viennent s’installée sur des gradins pour assister à des prouesses en vélo cross et à un concert.

tremplin en attente de vélos cross

tous ces « paquets » sont des bébés

Beaucoup portent des vêtements traditionnels, avec des bébés dans les tissus sur le dos. On boit un coup en attendant le début des festivités, puis, comme on a faim et froid, on va manger dans un petit resto plus bas. Ici aussi, les policiers usent de leurs sifflets pour réguler la circulation totalement impossible entre les bus, les voitures, les moto-taxis et les piétons dans les rues étroites et pentues… Au resto, il y a une famille de danois très très blonds avec une fillette grande et maigre qui ne tarde pas à jouer avec les garçons (c’est-à-dire à sauter du haut des marches sur le plancher en bois) et à parler avec eux en espagnol. Puis on retourne sur la place où le concert de rock est de trop pour ma migraine… Il est l’heure de rentrer au calme (si on fait abstraction de la circulation nocturne).

Lundi 1er mai. Tiens, Hervé a décidé de raconter cette journée ! Bon, c’est assez concis, mais c’est l’intention qui compte…

Nous sommes arrivés à Santa Teresa, après une belle route de terre et moult cailloux pointus et ronds (je pense que notre pneu arrière gauche est bientôt foutu…). L’élément le plus important sur ces pistes de la largeur du camping car : le klaxon !!

Vallée du Rio Urubamba

oui oui, c’est bien la route

croisons les doigts pour ne croiser personne…

Après une belle baignade dans les thermes magnifiques de Madame Teresa, on prépare tranquilou les sacs pour une marche de 11 km de Hidroelectrica à Aguascalientes, ville de départ pour le Machu Picchu. Marius et Aloïs ont retrouvé, dans l’eau, Golum, heu, pardon, Laura, la jeune danoise toute maigre d’hier.

En route vers le Machu Picchu !

Entonces en la escala de la tierra he subido
entre la atroz maraña de las selvas perdidas
hasta ti, Macchu Picchu.
Alta ciudad de piedras escalares,
por fin morada del que lo terrestre
no escondió en las dormidas vestiduras.
En ti, como dos líneas paralelas,
la cuna del relámpago y del hombre
se mecían en un viento de espinas.
Madre de piedra, espuma de los cóndores.
Alto arrecife de la aurora humana.
Pala perdida en la primera arena.

(Alturas de Machu Picchu, Canto general – Pablo Neruda)

 

Alors j’ai grimpé à l’échelle de la terre 

Parmi l’atroce enchevêtrement des forêts perdues

Jusqu’à toi Machu-Picchu.

Haute cité de pierres scalaires,

Demeure enfin de celui que la terre

N’a pas caché sous les tuniques endormies.

En toi, comme deux lignes parallèles,

Le berceau de l’éclair et celui de l’homme

Se balançaient dans un vent d’épines.

Mère de pierre, écume des condors.

Haut récif de l’aurore humaine.

Pelle abandonnée dans le premier sable.

(Les Hauteurs du Machu Picchu, Chant général – Pablo Neruda)

Mardi 2 mai. Parti sur sa lancée prolixe, Hervé continue aujourd’hui :

Départ des thermes au petit matin, après une nuit un peu agitée à cause des petites piqûres des mini-mouches thermales… Nous laissons le CC dans un camping et nous prenons un taxi pour Hidroelectrica. Le taxi est une Toyota Corolla blanche toute fracassée mais avec une jolie moquette poilue sur le tableau de bord. Rando de 11 km jusqu’à Aguascalientes : après 10 min de marche, Marius commence à râler tandis qu’Aloïs porte avec courage et fierté son sac à dos rempli et un peu lourd quand-même. Très belle marche, beaux paysages et c’est bien cool de suivre la voie ferrée (« on marche le long des rails parce que ce train, c’est le train le plus cher du monde », dixit Aloïs).

Départ

Aloïs, ne te retourne pas!!

passage obligatoire sur la passerelle piétonne

tout en haut, le Machu Picchu!

C’est beau, hein…

Si on s’y accrochait?

Rio Urubamba

bien concentrés

11 km plus tard… le village d’Aguascalientes

Nous voilà arrivés à l’hôtel, une petite chambre avec deux lits superposés et deux lits simples, une salle de bain bleue et très humide. On pose les sacs, douche chaude pour tout le monde et repos ! Le soir, nous allons manger dans un resto italien, Marius et Aloïs prennent des photos du feu d’ambiance et aiment beaucoup le passage des fanfares folkloriques dans la rue.

 

Mercredi 3 mai. Aujourd’hui, on monte au Machu Picchu ! Hervé se lève à 5h30 pour aller gravir les 1800 marches qui séparent Aguascalientes de la cité perchée en haut des montagnes. Les garçons et moi, on prend le bus (le plus cher du monde) et un peu après 7h, on retrouve Hervé à l’entrée du site.

Vert: à pied / Noir: en bus

On monte d’abord à la hutte du gardien du rocher funéraire, d’où la vue d’ensemble est superbe. Enfin, là, c’est le brouillard complet, on ne voit absolument rien à part des touristes, des guides et des gardiens.

On va donc vers l’Intipunku, la porte du soleil, à 45 min de marche sur des pavés et des marches glissantes, surtout qu’il pleuvine.

vers la Porte du Soleil

drôle de rencontre…

si si, c’est bien la Porte du Soleil (ou de la Brume, on ne sait plus trop)

Les garçons sont grognons, jusqu’à ce qu’une famille française nous dépasse. La tête de la maman (et sa voix) me dit quelque-chose : c’est la sœur jumelle de la mère de famille française croisée au Parc Huerquehue au Chili en mars ! Ils vivent à Santiago, et là-bas ce sont les vacances scolaires. Les enfants se connaissent donc déjà. On discute un moment, puis ils repartent pour monter en haut de la Montaña. Nous, on attend que la brume se lève, mais c’est pas gagné… On distingue parfois les terrasses en contre-bas, mais ça ne dure pas.

La vallée par laquelle on est arrivés la veille

Une petite Chloé péruvienne de 2 ans s’éprend d’Aloïs, lui touche les cheveux, lui tend sa poupée, et ne veut pas retourner avec ses parents ! On finit par se résoudre à redescendre à la hutte, le site est enfin visible et c’est très très beau : des lambeaux de brumes s’accrochent au Wayna Picchu, la grande montagne derrière. Le panorama est vraiment saisissant, avec l’écrin des montagnes qui entoure le site. C’est très vert très abrupt. Quelle idée de venir construire une telle cité à cette hauteur !

et finalement, entre les nuages…

le site « urbain »

la photo classique obligatoire

le quartier cérémoniel

On descend ensuite pour franchir la porte de la cité en elle-même. La famille française nous a donné un plan qu’ils ont imprimé, et il est le bienvenu car il n’y a aucun plan, aucune explication (à part les guides payants près desquels nous laissons parfois traîner une oreille). On passe par le quartier religieux, avec le temple aux trois fenêtres (la trilogie est omniprésente chez les incas, elle représente les trois animaux sacrés : le condor, le puma et le serpent ; et les trois lois principales : « Ama sua, ama quella, ama llulla – Ne vole pas, ne ment pas, ne sois pas paresseux »). Il y a aussi « le poteau d’amarrage du soleil », instrument astronomique précis utilisés pendant les solstices, puis des lieux cérémoniels.

un vrai puzzle

le Temple au 3 fenêtres (pile)

… et face

« la pierre cérémonielle » (en forme de puma endormi, d’après un guide inspiré)

On descend ensuite vers la grande place herbeuse principale et ses lamas, les maisons et les greniers (1800 personnes vivaient et travaillaient là), et on retrouve la petite Chloé.

La place

elle n’a d’yeux que pour lui

escaliers d’origine

des murs sous la végétation, comme lorsque le site a été découvert

Plus bas, on est obligé de suivre les flèches et de sortir du site, de passer devant les toilettes payantes et le snack et de re-rentrer (« ah, c’est comme à Ikea », dit Hervé aux gardes qui ne rigolent pas du tout – il n’y a pas d’Ikea chez les Inkas…) pour pouvoir aller voir le temple du soleil et le tombeau provisoire de l’Inca, le temple du condor et les fontaines en cascades qui alimentaient le site en eaux.

cache-cache dans le quartier résidentiel

Temple du Condor

Tête du Condor

Temple du Soleil

le tombeau de l’Inca

sans issue

Dernière porte

On commence à bien fatiguer, et le temps se couvre de plus en plus. Hervé redescend à pied tandis que les garçons et moi, on poireaute 1h sous la pluie en attendant un bus. On arrive trempés à l’hôtel. Le temps de nous reposer, de prendre une douche chaude et d’enfiler des vêtements propres et humide (tout est humide en permanence, ici, du moins en ce moment), on ressort pour aller manger au resto français El Indio Feliz, réputé, haut en couleurs et très bon. On passe une soirée assez incroyable. On rencontre d’abord une autre famille française expatriée à Santiago avec 4 enfants, puis on discute longtemps avec Patrick, le patron aux vies et talents multiples. On rentre bien tard !

Jeudi 4 mai. Le réveil est difficile : soirée arrosée, nuit courte car la spécialité des hotels ici c’est de servir le petit déjeuner jusqu’à 8h et de mettre tout le monde dehors à 9h… On remballe nos affaires humides et on prend le chemin du retour. Les garçons marchent les 11km cette fois sans rouspéter. Ils sont tout contents de voir passer un train et ils prennent le temps d’admirer les papillons.

Après un dernier regard au Machu Picchu visible depuis le pont métallique, on arrive à Hidroelectrica. Après le taxi qui nous ramène à Santa Teresa, on récupère le CC et on refait la piste pénible (quoi qu’un peu élargie depuis l’aller) vers Ollantaytambo. Les paysages sont toujours aussi magnifiques, entre la végétation tropicale en dessous de 2000m et les montagnes pelées avec le col à plus de 4000. On arrive avec la nuit à Ollanta, on se pose au parking des bus et on mange des pâtes italiennes artisanales rayées offertes par Patrick.

Vendredi 5 mai. Ce matin, on émerge lentement, puis on va apporter du linge à la lavanderia avant de nous promener dans les ruelles de Ollantaytambo, seule ville de la vallée à avoir complètement conservé son plan d’urbanisme inca. Même le système des rigoles avec de l’eau qui court un peu partout au milieu des rues est encore fonctionnel.

« Maman, regarde ce vieux toit, il doit être inca »

en face, on est sensé apercevoir le visage d’un inca dans la montagne

On va ensuite visiter le site inca, forteresse militaire et religieuse accrochée à la montagne. C’est d’ailleurs l’endroit d’une des rares victoires inca sur les conquistadors espagnols. Marius en a un peu ras-le-bol de toutes ces grandes marches, mais il finit par les grimper quand-même avec ses mollets incas. Lorsque la cité est finalement tombée aux mains des espagnols, elle n’était pas terminée, et on peut voir « traîner » des énormes blocs de pierres de la carrière voisine (sur l’autre montagne, en face, de l’autre côté de la rivière !) au milieu des ruines.

le bain de la princesse (ñusta)

On descend manger au resto du coin, puis on va se reposer pendant que Hervé, qui s’est rendu compte que c’était en fait le pneu arrière intérieur droit qui était crevé, entreprend tout un chantier : il s’agit de démonter notre paire de roues de secours neuve et de la mettre à l’avant et de récupérer une des roues avant pour remplacer la roue crevée. Je le laisse à sa tâche et je vais publier un article au café. Quand je reviens, il fait nuit, les garçons courent sur le parking en hurlant, Hervé a changé les roues avant mais n’a pas réussi à desserrer les boulons des roues arrière (vissées au pistolet à compression chez iveco de Santiago). Il a juste réussi à plier la barre prévue à cet effet ! Comme on n’a plus rien à manger, on veut aller au resto, et c’est à ce moment que se gare à côté de nous une famille française en Defender + cellule : Brice, Cécile, et leurs filles Laura et Zoé. On finit donc tous au resto pour une soirée bien sympa.

Samedi 6 mai. On range tout, les garçons rechignent à partir et préfèrent jouer sur le parking sale et poussiéreux avec leurs deux nouvelles copines. On traverse Ollanta et ses ruelles, il y a un mariage sur la place, ce qui ne facilite pas la circulation. On s’arrête à la gomeria – vulcanización-llanteria- borracheria (aux choix : chaque pays traversé a un mot différent pour désigner un atelier de réparation de pneus) à la sortie de la ville, mais le jeune gars a beau se démener, les boulons sont trop serrés. Nous voilà bons pour aller jusqu’à Urubamba, à 20km de là. Heureusement qu’on a des roues jumelées et que la roue valide supporte le poids ! Arrivés à la périphérie, on trouve un garage multiservicios juste en face d’un parc de jeux. Le temps pour les garçons d’aller se faire des copains, le monsieur démonte les roues, pose une rustine, regonfle la roue et remonte les 2 roues arrières. Puis Hervé fait des abdos pour fixer la roue rustinée en roue de secours, sous le chassis. On part ensuite à l’autre bout de la Vallée Sacrée, à Pisac, à l’est. On traverse des villages où les gens font rotir des cochons d’inde (cuyes) empalés sur des bâtons et les brandissent en direction des voitures… Piac (ou Pisaq) est connu pour ses ruines perchées en haut de nombreuses terrasses à pic, son marché touristique dominical et ses communautés hippies installées dans les environs pour l’énergie solaire, lunaire, et tout le reste. Nous, on trouve un petit parking payant (comme tout ici), défoncé et inondé, on va manger puis on fait un petit tour dans le marché où des enfants plus jeunes que Marius et Aloïs, en vêtement traditionnels, se font photographier pour 1 Sol.

rue de Pisac

On fait quelques courses au marché alimentaire puis on reprend le CC pour aller vers les ruines. Le vert foncé des terrasses contraste joliment avec la terre et la roche rouge foncé. Sur la route, on longe des jolies maisons aux fenêtres trapézoïdales et murs décorés de motifs incas et balcons en bois. Il est déjà tard lorsqu’on arrive au site, et au bout de 30 min, le garde siffle pour qu’on s’en aille. Marius est très fâché contre le garde qui ne nous permet pas d’aller jusqu’à a porte du soleil, pourtant tout près. On redescend un peu et on se gare à un point ioverlander : une sorte de terre-plein caillouteux au-dessus de la route. La vue est jolie et c’est calme, ça fera l’affaire pour cette nuit.

bivouac avec vue

 

Dimanche 7 mai. On traîne un peu ce matin : j’ai mal à la gorge, Aloïs dort jusqu’à 9h, Hervé s’active et Marius s’habille au bout de la 28ème fois qu’on lui demande. On repasse par Pisaq et on prend la route de Cuzco pour aller au Sanctuaire des Animaux. C’est un centre qui recueille des animaux victime du trafic et de la chasse illégale. Il y a des vigognes, des lamas, alpagas, des ours à lunette rigolos, un chat des montagnes, des pumas, des condors (c’est impressionnant de les voir de tout près !), des perroquets, des singes… La visite est intéressante et les garçons sont super contents de voir autre chose que des ruines ! Ils ont même droit à un souvenir en repartant : un ocarina, pour le bonheur de nos oreilles…

ours à lunettes

alpaga-rasta

tisserande en démonstration

On revient ensuite sur nos pas puis on prend la route de Puno. Pause midi à Andahuaylillas et visite de la « Chapelle Sixtine des Amériques » (un peu hors de prix) sur la très jolie place déserte. L’église est peinte et/ou dorée du sol au plafond, mais on n’a pas le droit de faire des photos. A la place, on nous offre un cd avec des photos (mais mon ordinateur n’a pas de lecteur de CD).

Andahuaylillas

On reprend la route, le temps est à la pluie. La route suit le cours d’eau dans la vallée et traverse des petits villages avec des habitants assis au bord de la route. Ils grignotent toutes sortes de choses, ça semble être l’activité dominicale. On arrive en fin d’après-midi à Raqchi, minuscule village au pied d’un grand mur inca : les vestiges du temple de Viracocha (le dieu créateur). C’est aussi un village très connu pour ses poteries. Bivouac dans un coin calme, près des champs de maïs et de quinoa. Le soir, l’orage gronde et les vaches qui trottent autour du CC ne sont visiblement pas rassurées.

Raqchi

Lundi 8 mai. Il fait frisquet ce matin, il y a même du givre sur le pare-brise de la voiture d’à côté. On quiute la paisible Raqchi pour aller en direction du Lac Titicaca (ou Titikaka). Pour aller sur la péninsule de Capachica, on doit passer par Juliaca. Cette ville remporte haut la main la palme de la ville la plus affreuse et la plus sordide du voyage. Rues défoncées, trafic intense, fumée noire et déchets partout, types à la mine très douteuse… C’est vraiment glauque. Cette énorme agglomération concentre une grande majorité d’indiens pauvres venus travailler dans les mines des alentours. On arrive à passer sans trop d’encombres.

autour de Juliaca

ah, les moto-taxis!

Sur la route du lac Titicaca

L’arrivée sur la péninsule est plus paisible, il n’y a pratiquement aucun véhicule. Le long de la route, c’est la période des moissons (à la main) dans les champs qui descendent jusqu’aux rives du lac. Des cochons noirs, attachés par une corde, farfouillent les champs de pommes de terre fraîchement récoltés. Après le village de Capachica, on croise surtout des ânes et des troupeaux de moutons menés par des petites dames en costume traditionnel et curieux chapeaux à pompons. On se dirige vers le village de LLachon, à la pointe sud, car c’est de là qu’on peut visiter les îles flottantes Uros, fabriquées en totora, un jonc qui pousse dans le lac. Les îles flottantes au large sont de vraies îles encore habitées, au contraire de celles en toc visitées en masse depuis Puno. Mais voilà : une arche en béton, marquant l’entrée du village, est en construction sur la route, et soutenue par des étais en bois trop bas pour qu’on passe avec le CC. Ne sachant pas trop où bivouaquer, on fait demi-tour et on va sur la plage de Chifrón, à l’est de la péninsule. C’est très mignon et paisible, à part un sale chien qui aboie à notre passage et tente de mordre les roues. On se gare au bout de la plage, puis on la traverse à pied pour aller demander au genre d’hostal si on peut aussi accéder aux îles à partir d’ici. Mais on fait faces à l’île Amantani, les Uros sont bien de l’autre côté…

plage de Chifron

En revenant, le soleil se couche, et le sale chien de tout à l’heure se met à courir vers nous on aboyant et en montrant le crocs. Je prends Aloïs dans les bras, Hervé se charge de Marius et fait face au chien pendant que j’avance comme je peux, dans le sable. Hervé recule lentement, il hurle sur le chien, lui jette du sable. Marius est terrorisé. Ça dure un bon moment, le chien est très agressif, Hervé pense à un moment qu’il va devoir poser Marius et se jeter sur le chien. Mais deux autres chiens, qui ont fait la sieste devant notre CC, viennent à la rescousse, et on profite de ce moment pour parcourir les derniers mètres jusqu’au CC. On est un peu secoués par cette mésaventure. Il y a énormément de chiens errants au Pérou, la plupart sont gentils mais faméliques. Dehors, la lune est plein et le lac est argenté.

pleine lune

Mardi 9 mai. Ce matin, les garçons sortent un peu sous bonne garde de Hervé (le chien n’est pas là), puis on décide de quitter l’endroit. On retourne sur la route de LLachon, et on repère un petit panneau qui indique une « association de tourisme » plus bas, vers le lac. On va voir à pied : on est reçu par Fredy, en maillot de foot, dans une jolie cour. Il nous propose de déjeuner là et de nous emmener ensuite sur une île flottante. Ça tombe bien ! On va se promener un peu vers le lac au ciel couvert, puis on retourne voir Fredy. Cette fois, il a mis un pantalon noir, une chemise blanche et un bonnet traditionnel. On nous fait goûter des longues pommes de terre biscornues qu’on peut manger crues, elles ont un goût sucré. On mange dans une pièce en compagnie des guides et l’équipage du bateau d’un groupe de touristes qui mange dans une autre pièce. C’est sympa, une des guides parle très bien le français, elle l’a appris avec une guide française qui était venue ici il y a 15 ans. Les trois membres de l’équipage viennent des îles Amantani et Taquile, et sont sortis pour la première fois de leur île à 18 ans, lorsqu’ils ont du aller se faire délivrer des papiers d’identité. Au menu : soupe de quinoa et légumes, truite grillée, riz et légumes, et petites crêpes de kinwa, une sorte de quinoa grise qui pousse à 4300m. Ensuite, Fredy nous propose de nous habiller en tenue traditionnelle : difficile de refuser ! Hervé a un poncho vert et un chapeau, les garçons sont en poncho rose et bonnet (la tenue des célibataires – pas pour longtemps, vu l’engouement qu’ils suscitent !), et moi j’ai droit à toute la panoplie des femmes mariées : grosse jupe orange, veste noire brodée, long tissu noir sur la tête et chapeau typique, sans oublier le tissu rayé attaché sur les épaules pour transporter tout ce qui est transportable. J’ai un peu de mal à bouger, sous cet attirail. Les gens de l’association se précipitent pour faire des photos avec les garçons.

seule photo à être rendue publique!

Puis nous rejoignons Fredy à l’embarcadère. Il a maintenant une veste et une casquette. Il est très fier de nous faire monter dans son bateau qui a une vraie cabine, et qu’il a bricolé et retapé.

Au bout de 10 min, les garçons sont ravis de conduire le bateau.

On arrive bientôt sur une île habitée par cinq familles. Le « presidente » nous accueille en chemise brodée enfilée par-dessus un jogging. La visite est bien rodée mais intéressante. Le chef nous explique l’origine et tout le procédé de confection des îles en totora, ainsi que leur mode de vie, basée sur la maintenance de l’île, la chasse, la pêche, l’artisanat et le troc avec le continent. Les garçons sont surtout intéressés par un chat qui est en train de voler du poisson dans une bassine en terre. Ils disent qu’ils veulent habiter sur une île comme ça, même après avoir visité un des petites cabanes très sommaires dans laquelle dort une famille de six personnes. Et ils aiment beaucoup manger la racine d’une totora que leur donne le chef.

ïle Uros

Il fait presque nuit lorsqu’on repart, puis Fredy nous indique un endroit où nous garer pour passer la nuit, après cette chouette journée.

Mercredi 10 mai. On se réveille tôt et on quitte la paisible péninsule pour filer vers Puno. La ville est assez moche, surtout lorsqu’on y arrive depuis les hauteurs, car on a l’impression qu’aucune maison n’est terminée. On s’engouffre dans les rues étroites, pentues, embouteillées, déviées au dernier moment et pleines de fils électriques enchevêtrés qui passent à quelques cm du toit du CC. On finit par trouver le supermarché et son grand parking, ouf ! Après les grosses courses (on espère que les douaniers boliviens ne seront pas trop zélés), on reprend la route et on sort de la ville en suivant un petit camion plutôt que le gps. On longe le lac et on décide de passer une dernière nuit au Pérou. On trouve une petit plage au pied d’une falaise creusée de deux grottes (très sales, évidemment) et sans chien ! Le soir, une barre de nuages noirs sur le lac se zèbre d’éclairs, puis viennent la grêle et la pluie. On est un peu seuls au monde et la nuit est très noire…

Qué tal la cosecha?

 

 

3 reflexions sur “Du 27 avril au 10 mai : de Cuzco au Lac Titicaca (1066 km – 23 494 km parcourus)

  1. Ememe Ka

    Mais Pauline il n’est pas venu à l’idée au Incas de construire une cité sur les hauteurs. Tu aurais du mieux prêter l’oreille aux guides. Ils ont construit la ville il y a fort fort longtemps lorsque le sol était plat. Et ils étaient déjà ouf car à l’époque les murs étaient fait en une seule pièce !!! C’était du costaud. Lors de l’épisode de surrection des Andes, les murs et chemins,… se sont fendillés dans tous les sens sous l’effet des contraintes de compression et de tension mais ils ont tenus bon. C’est pour cela que tous les morceaux ont l’air si bien agencés. Voila tout !
    PS: heureusement que Mamouna n’était pas avec vous, à tous les coups elle se serait fait piquer par le scolopandre…

    1. Pauline Auteur de l'article

      Ah oui, suis-je bête! J’ai du écouter le guide qui parlait en brésilien… et le mille pattes, il avait plutôt l’air gentil mais on ne lui a pas chatouillé le menton!

Répondre à sophie Annuler la réponse.